Trois semaines de grève à Infomer

Marée basse, mais le coeff restera dans les annales

(par Nicolas C., publié sur la liste Piges)


Après plus de trois semaines de grève totale, unanime, et solidaire des
pigistes, du jamais vu dans la maison Infomer, un accord a été signé le 7
mars. Maigre accord.
³ On n'est pas des poissons panés ² clamait le premier communiqué. Faut dire
qu¹à ces salarié-e-s, roulé-e-s dans la farine, on n¹a proposé que des
miettes.

Dans cette filiale du prospère groupe Ouest-France, les payes de misère des
25 pigistes basés dans les ports français s¹étaient comprimées avec le
temps. Le ressentiment aussi. Mal payé-e-s et parfois pas payé-e-s du tout
malgré un déplacement en mer, le suivi d¹une réunion de crise des pêcheurs
au petit matin, un colloque d'une journée, ou des enquêtes diverses sans
publication d¹article ou de photo. Corvéable et impayable à merci. Partis de
très bas, les salaires n'ont même suivi le coût de la vie. Portées depuis
deux ans par les délégués du personnel, les demandes polies de
revalorisation salariales n'avaient déclenché que des refus catégoriques et
agacés.
28 euros le feuillet, c¹était deux fois moins que la moyenne nationale en
vigueur. Contre exemple : le quotidien gratuit 20 minutes (à 50% détenu par
le même prospère groupe Ouest-France) rémunère ses pigistes à 75 euros le
feuillet.
La barre de revendication avait été mise assez bas, dans une vision
raisonnable, modeste, qui s¹est retournée contre les grévistes. Demandé peu,
obtenu moins. Normal. Après un si long conflit, la direction a très peu
lâché :35 euros tout de suite, une promesse à 40 euros dans un an. Ce point
d¹arrivée à 40 euros était le point de départ des revendications !

Les acquis de cette grève sont ailleurs : dans la formidable solidarité à
distance de ces journalistes opérant dans les ports de Marseille à Boulogne,
dans la détermination de collègues de travail distants de centaines de
kilomètres, réunis par une sorte d¹AG virtuelle permanente pendant tout le
conflit. Le débat a vite échappé à un mandat en blanc aux deux délégués,
pour lancer un forum permanent par mels, avec ses hauts et ses bas, ses
doutes et ses petits mots malheureux, mais surtout ses propositions
constructives pour l'action collective, les recherche de soutien du milieu
professionnel, les médias. Cette unité de gens qui ne se cotoient jamais
dans le boulot, la direction d¹Infomer ne s¹y attendait pas.

Les délégués se sont retrouvés à négocier avec une base réactive, débattant
tous les points de stratégie, les relais, les soutiens. Les textes,
communiqués, mels de protestation auprès du patron de ce petit groupe de
presse professionnelle, tout s¹est discuté, amendé, amélioré en direct.
Le flot de mels d¹indignation a montré son impact, relayé par divers réseaux
dont la liste piges, les syndicats, la démultiplication des carnets
d'adresse. Ce qui montre au patron d¹une boite que ce qui se passe chez lui
est suivi de près par des gens qu¹il ne situe pas, ni socialement ni
géographiquement. Une semaine, le dirigeant d¹Infomer a concédé avoir reçu
250 de ces mels !
Le pragmatisme des multiples réunions de négociation a plutôt usé ces
délégués au contact d¹une direction cassante, arrogante. Alors qu¹à travers
les mels échangés, la rage froide des salarié-e-s était parfois en relatif
déphasage.
La fin de la grève a été sifflée par le délégué CFDT seul, qui a, sans en
référer aux pigistes, signé l¹accord que toutes et tous trouvaient
insatisfaisant. Une fin en queue de poisson.
Mais on apprend beaucoup dans la solidarité. On apprend que le proverbial
climat paternaliste, démocrate chrétien d'Ouest France ("Justice et liberté"
dit la devise en Une) est désormais un mythe, dépassé par le climat de
mépris hautain et la crispation du conflit dus à la seule intransigeance de
patrons qui rêvent de transformer leurs pigistes salariés en vulgaires
prestataires de service dont on change comme de boulanger du coin.

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L¹accord :


Le marin (hebdo)
Le feuillet passe de 28 à 35 euros au 1er mars 05, et à 40 euros au 1er mars
06

L'Ostréiculteur Français (mensuel)
Le feuillet passe à 30 euros au 1er mars 05, à 32 au 1er mars 06
Photo : 20 euros au 1er mars 05

Indexation

Dès le 1er mai 2007 pour le marin et l'Ostréculteur.Français
Prise en compte, au 1er janvier 2007 du montant de l'indexation 2006 sur les
barèmes de l'ensemble des contributions (textes, photos, etc- du marin et de
l'Ostr.Fr
(Exemple, si l'indexation 2006 est à 1,5 %, le feuillet marin passe à 40,6
euros).
L'indice retenu est celui de la FNPS.

Le reste
o Dotation de 300 euros sur 3 ans pour le matériel, dès 2005 (1).
o Forfaits accès ADSL (environ 50 euros/mois)(1).
o Bons de commande précis pour papiers, photos...
o Principe d'une réunion annuelle (défrayée et payée) avec l'ensemble des
pigistes, au siège. La première pourrait avoir lieu en septembre/octobre
2005.

(1) Uniquement pour les 9 pigistes dits réguliers ( sur les 25 ) au sens du
dernier protocole électoral. Calculé selon un seuil de revenu.

Note:

Dans le cadre d'une camapgne de mailing de soutien, la direction d'Infomer a reçu plus de 250 messages de solidarité avec les journalistes pigistes en grève.
Dont celui de notre section et les messages individuels de nos adhérents.


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