Le droit et les droits des journalistes pigistes dans l'entreprise :

quelques jugements et textes légaux concernant les pigistes et la presse en général

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La prise en compte des pigistes dans les effectifs - la Circulaire Dutheillet De Lamothe : ce directeur des Relations du Travail au ministère du Travail a rédigé en 1991 un courrier destiné aux Inspecteurs du travail, en leur expliquant la "situation des journalistes pigistes au regard du droit du travail". Le mode de calcul proposé pour la prise en compte des pigistes dans les effectifs pour les élections des représentants du personnel, reste toujours en vigueur. Vous trouverez ici la page de garde de la Circulaire 91.6 du 27.03.91 ainsi que sa dernière page dont le texte instaure le mode de calcul suivant :
"Dans la mesure où les journalistes pigistes ont des périodes de travail irrégulières, il convient de les prendre en compte dans l’effectif de l’entreprise au prorata de leur temps de présence… au cours des douze mois précédents comme pour les salariés sous contrat à durée déterminée. Pour déterminer ce temps de présence il peut être fait référence à la somme de l’ensemble des piges versées par l’entreprise durant les trois derniers mois et de la diviser par un salaire de référence afin d’obtenir un nombre « d’équivalents salariés ». Ce salaire de référence pourrait être le salaire minimal d’un journaliste à temps plein de l’entreprise concernée".
Et concernant les références pour le calcul des effectifs et la rémunération des heures de délégation : "…Certes il peut exister une différence importante entre le salaire minimum et le montant des piges effectivement perçues mais il n’apparaît pas possible d’établir une référence à partir de ce dernier type de rémunération en raison de son caractère aléatoire".

- Le courrier intersyndical aux Inspecteurs du travail : signé par sept syndicats des journalistes, ce courrier adressé à tous les Inspecteurs de travail de France et de Navarre rappelle quelques points de droit concernant les journalistes pigistes, la présomption du contrat de travail, l'obligation pour l'entreprise d'acter le licenciement cas échéant, la prise en compte dans les accords d'entreprise, pour la participation, l'intéressement etc. A la fin du courrier il y a un recueil de jurisprudences récentes sur toutes ces questions.
Autre particularité de ce courrier : signé par l'ensemble des syndicats, il représente une plate-forme de revendications commune et un engagement minima pour nos délégués syndicaux respectifs concernant les droits essentiels des pigistes dans les entreprises de presse.

- La prise en compte des journalistes pigistes pour le calcul des effectifs lors des élections du comité d'entreprise : le jugement de la Cour de Cassation du 8.03.95. Contrairement à une idée souvent véhiculée par les patrons, ce jugement ne dit pas que les pigistes ne doivent pas compter dans les effectifs. Il précise que « seules peuvent être considérées comme des salariés de l’entreprise et prises en compte dans l’effectif, les personnes dont l’activité principale est celle de journaliste et qui collaborent au journal de façon régulière ». A noter que le terme « collaboration régulière » n’est pas synonyme de « collaboration permanente » ni « collaboration ininterrompue ». La Cour de Cassation a déjà admis que le travail par nature discontinu de certains salariés n’entraînait pas une interruption du contrat de travail et qu’ils étaient donc éligibles. La définition de cette « collaboration régulière » est négociée au coup par coup pour chaque accord pré-électoral.

- Le Journal du Textile - l'éligibilité des journalistes pigistes dans l’entreprise. Jugement du TI 11ème du 17.06.2005 : aucune condition de présence physique dans les locaux de l’entreprise ne peut être imposée. La direction du Journal du Textile a essayé d’imposer cette clause de présence physique. Elle a été condamnée par le Tribunal d'instance du 11ème arrt de Paris à renégocier l’accord préélectoral.

- L'Humanité - un jugement sur la liste électorale. TI de Saint Denis, le 22.02.05 : l'Humanité refusait l’inscription sur les listes électorales des journalistes pigistes ayant perçu moins de 40% du salaire minimum conventionnel correspondant au coefficient 120, soit moins de 704,34 euros, sur les douze derniers mois. Le juge a rejeté la demande d’inscription sur les listes des journalistes pigistes ne remplissant pas les conditions de la direction. Sous prétexte qu’il n’y avait pas de preuve que les pigistes en question étaient journalistes professionnels, donc la présomption du contrat de travail de l’art L761-2 ne s’appliquait pas.
Il y a une longue tradition de non-droit pour les pigistes à l’Humanité : le journal les a depuis toujours payés en dessous du barème minima pour les quotidiens nationaux.

- L’UES Moniteur – Action Municipale, les conditions d’électorat, TI 2ème arrt, du 4.07.05 : Le tribunal a fixé les conditions d’électorat et de la collaboration régulière : soit au minimum six bulletins de pige au cours des douze derniers mois et sans condition de ressource, soit au minimum trois bulletins et un salaire minimum annuel de 1805,85 euros, soit 50% du salaire minimum garanti du rédacteur 3ème catégorie pendant trois mois. Pour être éligible : les mêmes conditions et avoir eu sa première collaboration depuis au moins un an.
Le tribunal a ordonné une expertise par l’inspection du travail, pour faire inscrire les dates d’entrée de chaque journaliste pigiste sur le registre unique du personnel.

- La base de calcul des primes d’ancienneté pour les journalistes pigistes ne peut pas être limitée au Smic même en absence de barème minima de pige.
« Vu les articles 22 et 23 de la Convention collective nationale des journalistes ; Attendu que, pour limiter à .une certaine somme le rappel de prime d'ancienneté qu'elle a alloué au salarié, la cour d'appel énonce qu'en l'absence d'accord professionnel spécifique il convient de se référer au SMIC ; Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel, qui devait faire application de la Convention collective nationale des journalistes et des accords spécifiques de salaires annexés à celle-ci, a violé les textes susvisés ; »
Cassation – Sociale – 03-42428 du 10.05.05

- Le régime des cotisations sociales des « pigistes »
Le « pigiste » est assujetti au régime générale de la sécurité sociale si l’activité de journaliste est son activité principale et s’il en tire le principal de ses ressources. La rédaction régulière d’articles spécialisés ne suffit pas.
Cassation – Civile – 03-30355 du 18.01.05

- Le paiement de la seconde publication à 50%
La cour de Cassation admet que le fait que « …la seconde publication, dans la mesure où elle n’exigeait pas une nouvelle prestation créatrice, ouvrait droit à une rémunération de 5% de la première… » fait partie des « usages de la profession ».
Cassation – Civile - 02-19736 du 25.01.05

- Pas de cession automatique des droits d’auteur
« L'existence d'un contrat de travail n'emporte aucune dérogation à la jouissance du droit de propriété intellectuelle de l'auteur, de sorte qu'à défaut de convention expresse conclue dans les conditions de la loi, l'auteur de photographies ne transmet pas à son employeur, du seul fait de la première publication rémunérée à titre de salaire, le droit de reproduction des oeuvres. »
Cassation – Civile – 03-21095 du 12.04.05

- Pas de réaffectation à un autre titre sans accord préalable.
« …si un journaliste est appelé par son employeur à collaborer à un autre titre que celui ou ceux auxquels il est attaché, ou à exécuter son contrat de travail selon un mode d'expression différent, cette modification doit faire l'objet d'un accord par échange de lettres entre les parties… ». Le refus n’est pas une faute grave.
Cassation – Sociale – 03-43506 du 24.05.2005

- Les conditions d’une Unité économique et sociale (UES) – nomination d’un délégué syndical.
« …l'existence d'une unité économique ne suffit pas à établir l'existence d'une communauté de travail »
Cassation - Sociale – 04-60297 du 20.04.05


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